Du 20 au 24 septembre sest tenue à Bruxelles
une importante réunion de négociations pour un accord
entre lUnion européenne et le Mercosur (Argentine, Brésil,
Paraguay et Uruguay). La réunion sest conclue par ce
quil faut bien appelé un échec. Via Campesina,
mouvement international de coordination dorganisations de petits
et moyens paysans, travailleurs ruraux et communautés indigènes,
a publié un communiqué qui souligne de façon
instructive les points qui ont fait difficulté, notamment en
raison des propositions européennes trop restrictives. Nous
publions ci-dessous le résumé du communiqué de
Via Capesina, paru dans ALAI/America latina en movimiento, le 28 septembre
2004.
Un communiqué de Via
Campesina cherche à attirer lattention des Brésiliens
sur les négociations de lAccord Mercosur / Union européenne.
Dans ce document, on trouve un bilan de ce qui pourrait être approuvé
et de ce qui a été discuté dans la réunion
de Bruxelles du 20 au 24 septembre, dont les grands médias ont
peu parlé.
Via Campesina avertit que, alors que la société brésilienne
concentre toute son attention sur les élections et que les mouvements
sociaux se dispersent sur dautres questions, les « représentants
» gouvernementaux voient dans ce contexte le moment idéal
pour accélérer les négociations entre le Mercosur
et lUnion européenne sans demander lavis daucun
secteur de la société. Du 20 au 24 septembre, les négociateurs
de ces deux régions se sont réunis à Bruxelles
pour présenter les tarifs douaniers et les conditions du processus
dintégration.
Pour Via Campesina, dans les négociations avec lALCA (Accord
de libre commerce des Amérique), les diplomates brésiliens
ont été prudents et se sont comportés « comme
des commerçants de seconde zone» face à lUnion
européenne. Les négociations ont été tellement
menées sous pression que le représentant du ministère
du développement agraire sest retiré des négociations
en signe de protestation.
Le président de la Commission européenne, Romano Prodi
et ses commissaires finissent leurs mandats le 31 octobre. Cest
alors une nouvelle équipe représentant lEurope des
25 qui assumera les négociations. Cest pourquoi, il y a
urgence à conclure les accords avant cette date.
Mais le Mercosur, présidé par le Brésil, a demandé
la suspension de la réunion en raison du repli des positions
européennes spécialement dans le domaine agricole. Cependant,
linterruption na pas signifié une rupture des négociations.
Pour quelques spécialistes, si laccord nest pas conclu
en octobre le changement de commissaires européens inclura
les représentants des dix nouveaux membres de lEurope de
lEst, qui sont contre cet accord les négociations
progresseront difficilement.
LAccord
Le document de Via Campesina affirme que dans cet accord bi-régional
entre le Mercosur et lUnion européenne, le Brésil
a offert 90 % daccès au marché, ce qui en pratique
signifie que les produits européens entreront sans payer de droits,
cest-à-dire quil ny aurait pas de taxes à
limportation au Brésil pendant dix ans. Un des cas les
plus préoccupants est celui du lait, considéré
comme un produit sensible pour le Mercosur. Aujourdhui lentrée
du lait européen au Brésil et dans le Mercosur est taxée
de 27 %. En revanche, la liste dexception des produits du Mercosur
déjà reconnus sensibles n'a pas été intégrée
dans laccord bi-régional.
Lagriculture familiale paysanne au Brésil est responsable
pour 82 % des 1,8 million dexploitations productrices de lait
au Brésil, et au moins de 80 % de la production. Si laccord
avait été signé aujourdhui, la taxe dimportation
du lait qui est de 27 % serait passée à 0 %. Limportation,
déjà élevée aujourdhui surtout pour
le lait en poudre et le sérum de lait en poudre, serait désastreuse
et affecterait considérablement les prix nationaux et la vie
de millions de petits agriculteurs.
Quant à la viande, les Européens nous offrent des quotas
dexportation inférieurs à ceux que nous avons aujourdhui,
cest-à-dire 106 mille tonnes alors que nous en exportons
215 mille. (...) Qui plus est, ils proposent également un mécanisme
daugmentation des taxes lorsque les exportations augmentent. Ceci
signifie que plus nous exportons, plus limpôt sera élevé.
Dans le secteur des services, le Brésil qui est en train douvrir
totalement le secteur des télécommunications, des services
de lenvironnement, financiers, bancaires et dassurance,
peut perdre du terrain face aux entreprises multinationales qui pourront
agir sans aucune restriction ou conditionnement dans toutes ces régions
et contrôler ces marchés qui sont stratégiques pour
lavenir du pays. Il ny a pas douverture de la part
des Européens pour laccès de nos produits ayant
une valeur ajoutée, qui sont en concurrence avec les leurs.
En plus, le communiqué de Via Campesina met en valeur le fait
que lAccord Mercosur / Union européenne serait le premier
engagement international que le Brésil assumerait dans le secteur
des investissements. Même si le Brésil est un pays ouvert
à linvestissement étranger, un accord dans ce sens
retirerait au gouvernement le pouvoir de décider, de légiférer
et de contrôler pour protéger les intérêts
nationaux quand ce serait nécessaire.
Dans la proposition initiale, le gouvernement brésilien a introduit
des restrictions aux investissements étrangers dans lagriculture,
qui seraient susceptibles de compromettre les politiques nationales
de réalisation de la réforme agraire. Le gouvernement
brésilien vise avant tout à protéger le PRONAF
(Programme national de renforcement de lagriculture familiale).
Il a également maintenu des mesures restrictives sur lacquisition
de terres par les étrangers.
Entre temps, lUnion européenne a remis à Itamary
[allusion au palais du ministère des affaires étrangères]
un document dans lequel elle demande la levée de la restriction
relative à la « réforme agraire » et à
lagriculture, entre autres.
Les Européens veulent également garantir la propriété
intellectuelle relative à lIdentification géographique
(IG) des vins, fromages, jambons, etc. Ce qui équivaut à
dire nous ne pourrions produire aucune espèce de fromage parmesan,
de gorgonzola, car ces IG seraient déjà protégés
par des brevets européens. Nous ne pourrons pas non plus vendre
notre « mortadelle » parce que la mortadelle de Bologne
est protégée par son Identification géographique.
Traduction DIAL.
En
cas de reproduction,
mentionner la source DIAL.