Au mois de septembre, nos lecteurs ont été informés
(cf. DIAL D 2666) des menaces
de mort dont plusieurs personnes faisaient lobjet de la part dun
fazendeiro (grand propriétaire terrien) du nom de Branquinho.
Détenu en prison depuis le 24 septembre dernier, il vient de
senfuir, jouissant, comme tant dautres grands propriétaires,
de complicités qui lui assurent une quasi-impunité. Nous
publions à ce sujet la réaction exprimée dans une
lettre publique de Dom Tomás Balduino, président de la
Commission pastorale de la terre et du Frère Xavier Plassat (qui
a lui-même fait lobjet de menaces avec ses collègues),
coordinateur de la Campagne nationale de la CPT contre le travail esclave
au Brésil, en date du 6 novembre 2003.
Le procureur-chef du ministère public
fédéral vient de communiquer à la CPT que le
fazendeiro Branquinho (Aldimir Lima Nunes), objet dun mandat
de prison préventive émis par la justice fédérale,
sest échappé le 5 novembre au matin, sans rencontrer
le moindre obstacle, du Centre de récupération métropolitain
du système pénal de lÉtat du Pará
où il était détenu depuis le 24 septembre dernier.
Branquinho est accusé devant la justice fédérale
du Pará pour plusieurs crimes (1)
: homicides, formation de bande armée, embauche trompeuse, réduction
de travailleurs à une condition analogue à celle desclave,
menaces de mort, y compris contre autorités publiques, délits
fiscaux. Devant la justice de lÉtat du Tocantins, il répond
en outre de divers homicides quil aurait commis dans la région
dAnanás-TO. Branquinho était en fuite depuis près
dun an quand, traqué, il finit par se présenter
à la police fédérale de la ville de Marabá.
Les deux recours interjetés contre son incarcération (habeas
corpus) ont été rejetés par le tribunal fédéral
de la 1ère Région ; de même, deux demandes de révocation
du mandat de prison ont été rejetées par le juge
fédéral de Marabá.
Aussitôt après son arrestation, le procureur général
avait requis du juge fédéral Cláucio Ferreira Maciel
Gonçalves quil sassure des conditions de sécurité
offertes par létablissement carcéral où Branquinho
avait été conduit. Dans sa requête, il insistait
sur les caractéristiques de laccusé qualifié
de « très dangereux, disposant dun potentiel économique
élevé et dune grande capacité dinfluence
dans la région » et se référait à
la gravité des inculpations ayant motivé le mandat darrêt,
citant en particulier les « menaces de mort contre le procureur
de la République chargé denquêter sur sa conduite
criminelle ». Le procureur sollicitait le transfert éventuel
de laccusé vers un local plus sûr. Au vu de linsuffisance
des garanties de sécurité fournies, le juge fédéral
décréta, la semaine dernière, le transfert du détenu
vers Belém, capitale de lÉtat du Pará. De
manière inexplicable, ce transfert navait pas encore été
réalisé.
Devant ce nouveau spectacle, lamentable et dramatique, produit par le
système policier du Pará, nous interrogeons les autorités
: à quoi sert de promettre le durcissement des sanctions pénales
et la définition de la compétence du juge fédéral
pour ce type de cas, si le pouvoir dÉtat se montre incapable
dassurer la détention des accusés? Concrètement,
dans ce cas précis, quel intérêt y a t-il pour le
gouvernement fédéral à mettre à la disposition
du gouvernement du Pará un budget considérable pour renforcer
la lutte contre la violence dans cet État, si la corruption et
lincurie continuent à ronger de lintérieur
les forces policières chargées de ce combat ?
La CPT nationale, avec la Coordination de la Campagne nationale contre
le travail esclave, exige que léradication du travail esclave
soit conduite avec fermeté, cohérence, continuité
et implacabilité, de la part de toutes les institutions concernées.
Goiânia, le 6 novembre 2003
Dom Tomás Balduino
Président de la Commission
pastorale de la terre
Frère Xavier Plassat
Coordinateur de la Campagne nationale de la CPT contre
le travail esclave au Brésil
(1) - Depuis l´opération de police conduite
à Ananás en octobre 2002 par la police fédérale
et le ministère public fédéral, Branquinho était
en fuite. Cette opération avait été motivée
par une succession d´homicides contre des travailleurs ruraux
de cette région, embauchés frauduleusement par des intermédiaires
pour travailler dans des fazendas du sud du Pará, au service
de divers propriétaires, parmi lesquels Aldimir Lima Nunes. Ces
faits, documentés par la CPT, avaient été portés
par celle-ci à la connaissance des autorités fédérales.
Depuis lors avaient proliféré les menaces de mort proférées
contre le travailleur Jair Matos (qui avait dénoncé la
situation), contre trois agents de la CPT d´Araguaína-TO
(Edmundo Rodrigues Costa, Silvano Rezende, fr. Xavier Plassat), et contre
le procureur de la République Mário Lúcio de Avelar,
de Palmas-TO.
Traduction DIAL
En cas de reproduction,
mentionner la source DIAL.
Propositions de lettres à envoyer
Au ministre de la justice
Mr le Ministre de la Justice
Exmo Sr Márcio Tomaz Bastos
Esplanada dos Ministérios
Bloco T, Ed. Sede
CEP 70064 - 900
BRASÍLIA - DF
E.mail: gabinetemj@mj.gov.br
Fax: 061 322 6817
Monsieur le Ministre,
Je me permets de vous manifester ma stupéfaction en face des
dernières péripéties du cas Branquinho (Aldimir
Lima Nunes), ce fazendeiro recherché par la police fédérale
depuis près dun an et qui, le 05/11/03, sest évadé,
sans rencontrer la moindre résistance, de la maison de détention
de la police civile de Marabá (Pará) où il avait
été incarcéré le 24/09/03. Cet homme est
sous le coup de graves accusations, dont celles de menaces de mort contre
plusieurs personnes engagées dans la lutte contre le travail
esclave (qui est une priorité du gouvernement brésilien).
Je trouve lamentable quune nouvelle fois la justice soit tournée
en ridicule par la fuite dun détenu, selon une triste coutume
de lÉtat du Pará.
Je sollicite que tout soit fait pour recapturar cet accusé considéré
comme étant de grande dangerosité, de lopinion même
du ministère public fédéral, et pour enquêter
sur les complicités dont il a pu bénéficier au
sein de lappareil policier.
Je sollicite en outre que toutes garanties de sécurité
soient fournies aux personnes dont la vie est mise en danger à
la suite de cette évasion: le travailleur rural Jair Matos et
son épouse ; les membres de la CPT : Edmundo Rodrigues Costa,
Silvano Rezende et fr. Xavier Plassat; le procureur de la République
dr. Mário Lúcio de Avelar.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, lexpression de ma
haute considération.
Au gouverneur de lÉtat
du Pará
Mr le Gouverneur de lEtat du Pará
Exmo Sr Simão Jatene
Governador do Estado do Para
Palácio dos Despachos
Rodovia Augusto Montenegro Km 09
CEP 66823-010
Belém P-A
E.mail: seegov@prodepa.gov.br
Fax: 091 248 0133 (ou 211 52 11 ou 211 5389)
Monsieur le Gouverneur,
Je me permets de vous manifester ma stupéfaction en face des
dernières péripéties du cas Branquinho (Aldimir
Lima Nunes), ce fazendeiro recherché par la police fédérale
depuis près dun an et qui, le 05/11/03, sest évadé,
sans rencontrer la moindre résistance, de la maison de détention
de la police civile de Marabá (Pará) où il avait
été incarcéré le 24/09/03. Cet homme est
sous le coup de graves accusations, dont celles de menaces de mort contre
plusieurs personnes engagées dans la lutte contre le travail
esclave (qui est une priorité du gouvernement brésilien).
Je trouve lamentable quune nouvelle fois la justice soit tournée
en ridicule par la fuite dun détenu, selon une triste coutume
de lÉtat du Pará.
Je sollicite que tout soit fait pour recapturar cet accusé considéré
comme étant de grande dangerosité, de lopinion même
du ministère public fédéral, et pour enquêter
sur les complicités dont il a pu bénéficier au
sein de lappareil policier de lEtat.
Je sollicite en outre que toutes garanties de sécurité
soient fournies aux personnes dont la vie est mise en danger à
la suite de cette évasion: le travailleur rural Jair Matos et
son épouse; les membres de la CPT : Edmundo Rodrigues Costa,
Silvano Rezende et fr. Xavier Plassat; le Procuradeur de la République
dr. Mário Lúcio de Avelar.
Veuillez agréer, Monsieur le Gouverneur, lexpression de
ma haute considération.