Le triomphe de Lula au Brésil
aura certainement pour effet de rendre plus difficiles les négociations
continentales sur la Zone de libre-échange des Amériques
(ZLÉA), traité qui inclut, comme lindique son nom,
la totalité des pays du continent américain, à
lexception de Cuba. Certains y voient une occasion rêvée
de faire avancer le traité de libre-échange entre lAmérique
centrale et les États-Unis et, par répercussion, le Plan
Puebla Panama. Larticle ci-dessous présente les éléments
de base nécessaires à la compréhension de ce dernier
projet dont lobjectif est le lancement de travaux publics considérables
susceptibles dattirer les investisseurs étrangers. On en
attend officiellement des créations demplois et une réduction
de la pauvreté, mais ce dernier point fait lobjet dévaluations
critiques. Texte de Miguel Pickard, paru dans Envío (Nicaragua),
novembre 2002
Le Plan Puebla Panama est facile à
comprendre. Il s'agit d'un énorme projet de construction d'infrastructures
conçu pour favoriser les grandes entreprises, dans une région
qui comprend neuf États du sud-sud-est du Mexique et les sept
pays d'Amérique Centrale.
D'où vient l'impulsion du Plan Puebla Panama ?
L'impulsion semble être donnée par le Mexique plus que
par n'importe quel autre pays, puisque la conception de ce plan est
imputée au gouvernement de Vicente Fox. Mais, en réalité,
il trouve son origine dans des plans et des projets imaginés
antérieurement par la Banque mondiale et la Banque interaméricaine
de développement (BID) pour le Mexique et l'Amérique centrale.
Après la prise de pouvoir de Fox en décembre 2000, son
gouvernement a réuni divers projets régionaux du Mexique
et de l'Amérique centrale en un seul "paquet" qu'il
a appelé Plan Puebla Panama. Puis il l'a présenté
aux mandataires d'Amérique centrale lors d'un sommet qui s'est
tenu en El Salvador le 15 juin 2001. Et le Plan Puebla Panama a été
approuvé par la suite.
Le Plan Puebla Panama a-t-il un rapport avec lAccord de libre-échange
nord-américain (ALENA) ?
Oui. L'ALENA (Accord de libre-échange nord-américain)
est l'accord commercial entré en vigueur entre les États-Unis,
le Canada et le Mexique en 1994. Il fixe les "règles"
des échanges commerciaux entre ces trois pays. Aujourd'hui, les
États-Unis cherchent à étendre ces mêmes
règles aux 34 pays de l'Amérique du Nord, Centrale et
du Sud et à ceux des Caraïbes, sauf Cuba, à l'intérieur
d'une zone commerciale dénommée ZLÉA (Zone de libre-échange
des Amériques). La ZLÉA revêt une dimension géopolitique
très importante pour les États-Unis. Elle crée
un bloc commercial unique, "de l'Alaska à la Patagonie",
sous la tutelle des États-Unis, qui seront ainsi mieux armés
pour lutter contre leurs concurrents commerciaux : les Européens
et les Asiatiques. La ZLÉA placera le continent américain
sous la domination commerciale des États-Unis. Les accords commerciaux
défendus par les États-Unis (ALENA et ZLÉA) sont
une condition nécessaire à la création d'un "bon
climat" comme celui que recherchent leurs grandes entreprises.
Le Plan Puebla Panama entre dans cette logique, mais il présente
une coloration particulière puisqu'il canalisera des milliards
de dollars de fonds publics, de ressources gouvernementales, pour le
développement des infrastructures que les grandes entreprises
demandent et dont elles ont besoin.
En quoi le Plan Puebla Panama est-il lié à d'autres
plans ?
Le Plan Puebla Panama est lié à un autre projet d'infrastructures
en cours en Amérique du Sud et dénommé IIRSA (Initiative
pour l'intégration régionale de l'Amérique du Sud).
Le Plan Puebla Panama et l'IIRSA visent à une même chose
: créer les infrastructures de base, ou améliorer celles
qui existent, afin d'inciter les grandes entreprises à investir.
La construction et la modernisation des infrastructures permettront
aux entreprises d'accroître leurs revenus grâce, entre autres
avantages, à une facilitation des mouvements de marchandises
à destination ou en provenance de notre région, et à
une amélioration du réseau routier. Le plus remarquable
est que le coût de tous ces projets d'infrastructures sera en
grande partie à la charge des populations des pays participants.
Les travaux seront payés par nos impôts, ou par le biais
de prêts octroyés par la Banque interaméricaine
de développement (BID) et la Banque mondiale, qui aggraveront
la dette extérieure et qui, à long terme, devront aussi
être remboursés par les contribuables.
Qui seront les principaux bénéficiaires ?
Les principaux bénéficiaires seront les grandes entreprises
américaines. Le Plan Puebla Panama facilitera les investissements
des sociétés transnationales dans une région très
riche en pétrole, en minerais, en forêts, en biodiversité,
en eau et en attraits touristiques. La zone que nous occupons est l'une
des régions du monde où la biodiversité est la
plus importante, ce qui la rend particulièrement intéressante
pour les entreprises pharmaceutiques, celles qui commercialisent des
semences, et les entreprises biotechnologiques qui travaillent sur les
manipulations génétiques. Elle représente en outre
une zone géographique d'un grand poids stratégique : elle
constitue la ceinture de l'Amérique, la partie la plus étroite
du continent, ce qui en fait un couloir naturel pour le commerce entre
l'Est et l'Ouest.
Le Plan Puebla Panama profitera-t-il uniquement aux entreprises américaines?
Certes, les investisseurs à la recherche de profits dans la zone
couverte par le Plan Puebla Panama peuvent venir de n'importe quelle
partie du monde, mais les entreprises états-uniennes seront à
coup sûr les principales bénéficiaires. Et cela
pour plusieurs raisons. Premièrement, parce que la zone du Plan
Puebla Panama est depuis le XIXème siècle le "pré
carré" des États-Unis et que, depuis cette époque,
les États-Unis manoeuvrent pour y faire prévaloir leurs
intérêts politiques et commerciaux. C'est ce qu'a déclaré
leur secrétaire d'Etat, Colin Powel, avec une franchise qui peut
surprendre : «Notre objectif, avec la ZLÉA, est de nous
assurer le contrôle d'un territoire qui s'étend du pôle
arctique à l'Antarctique auquel les entreprises nord-américaines
puissent avoir librement accès et sur lequel elles ne rencontrent
aucun obstacle ni aucune difficulté pour vendre nos produits,
services, technologies et capitaux sur tout l'hémisphère.»
L'autre raison tient au fait que les stratèges américains
en matière de sécurité manifestent un regain d'intérêt
pour le Mexique et l'Amérique centrale depuis les attentats du
11 septembre, et que George W. Bush n'a pas tardé à proposer
un nouveau traité de libre-échange avec l'Amérique
centrale, en janvier 2002, et obtenu du Congrès le feu vert pour
négocier avec habileté des traités commerciaux
en empruntant la voie accélérée (fast track). Une
autre raison importante vient de ce que la plupart des échanges
commerciaux du Mexique et de l'Amérique centrale, à l'exportation
comme à l'importation, se font avec les États-Unis. Dans
le cas du Mexique, plus de 85 % de ses exportations sont destinées
aux États-Unis, et un pourcentage comparable de ce qu'il importe
vient du même pays. Dans une moindre mesure, l'Amérique
centrale dépend également des États-Unis pour son
commerce extérieur. Toutes ces raisons expliquent que ce seront
les entreprises transnationales américaines, déjà
très liées à cette région, qui profiteront
le plus du Plan Puebla Panama.
Pourquoi cette région a-t-elle cédé ?
Selon l'explication officielle, il s'agit de promouvoir les investissements
étrangers dans une région riche en ressources naturelles
mais caractérisée par les niveaux de pauvreté les
plus élevés de l'Amérique. Encouragée par
la BID et la Banque mondiale, l'administration de Vicente Fox a présenté
le Plan Puebla Panama comme un mécanisme permettant d'aborder
le problème de la pauvreté dans la région d'une
manière "intégrale". Selon le point de vue du
gouvernement Fox et des stratèges néolibéraux,
le problème de la pauvreté doit être abordé,
mais pas nécessairement "réglé", parce
que cela nous amènerait, pour commencer, à nous interroger
sur les raisons d'une telle pauvreté. Dans l'optique néolibérale,
pour s'attaquer à la pauvreté, il faut créer des
emplois, et on compte pour cela sur les entreprises transnationales
qui choisiront d'investir dans la zone du Plan Puebla Panama.
Pourquoi les entreprises n'ont-elles pas encore commencé à
investir ?
Le principal souci des entreprises transnationales est de trouver dans
le monde des endroits où elles puissent réaliser des bénéfices,
mais comme les pays sous-développés de toute la planète
se livrent aujourd'hui une grande concurrence pour attirer des investisseurs,
ces entreprises peuvent "s'offrir le luxe" d'être sélectives.
Elles veulent que les choses leur soient facilitées, qu'elles
se déroulent à leur convenance et, autrement dit, que
les gouvernements leur simplifient les problèmes d'infrastructures
auxquels nos pays sont confrontés.
Les entreprises se posent diverses questions. Pourquoi installer des
usines dans une région qui manque de sources d'énergie
fiables ? Vu l'état du réseau routier, comment alimenter
les usines en biens de production et comment en sortir les produits
finis ? Lorsqu'elles ont besoin de grandes étendues de terre
pour pratiquer la monoculture d'exportation, les entreprises doivent
savoir si le secteur a été "débarrassé"
des paysans ou si ces derniers ont été mis en disponibilité
avec l'aval du gouvernement. De même, lorsqu'elles se proposent
de prospecter des zones riches en biodiversité à la recherche
de végétaux et de microorganismes intéressants,
elles se posent la question de savoir si l'on a délogé
ou neutralisé la population indigène locale pour leur
garantir un accès facile et rapide à ces ressources sans
risque de susciter un scandale. Avant d'investir le moindre centime,
les entreprises transnationales veulent que tous les points aient été
réglés. Sans compter les "cadeaux" habituels
que leur font les gouvernements : terrains gratis pour construire leurs
usines, électricité, eau et gaz gratuits, exonérations
fiscales pendant des décennies, formation de leur personnel aux
frais de l'Etat et autres "incitations".
Que fera le Plan Puebla Panama pour attirer des investissements ?
Un des principaux volets du Plan Puebla Panama est la construction de
routes. Deux axes sont prévus. Le premier longera le golfe du
Mexique, de la frontière du Texas jusqu'à la péninsule
du Yucatán, avec des "dérivations" vers le Belize,
le Guatemala et le Honduras. Le deuxième axe suivra la côte
pacifique, de Mexico vers le Guatemala et l'isthme de l'Amérique
centrale jusqu'au Panama. Il s'y ajoute la construction de 25 barrages
dans la région du Plan Puebla Panama, qui produiront l'énergie
nécessaire pour permettre l'industrialisation de la zone et pour
satisfaire la demande énergétique des États-Unis.
Cet élément est l'un de ceux qui présentent le
plus de danger pour les populations indigènes. La construction
de ces barrages devrait entraîner la submersion de milliers d'hectares
de terres utiles et, en conséquence, la destruction de sites
archéologiques, vieilles forêts, villes et communautés
indigènes. On parle d'au moins deux barrages, et peut-être
de cinq, sur le fleuve Usumacinta, qui sépare le Mexique du Guatemala.
De même, de nombreuses infrastructures seront créées
pour lier le golfe du Mexique au Pacifique. Un "canal à
sec" est déjà en construction dans l'isthme de Tehuantepec,
partie la plus étroite du Mexique, pour accélérer
les mouvements de produits en conteneur dans le cadre des échanges
commerciaux Est-Ouest.
Quelles sont les principales composantes du Plan Puebla Panama ?
Il comporte huit composantes qui, dans les documents officiels, se présentent
généralement dans l'ordre suivant :
- développement durable,
- développement humain,
- prévention et réparation des catastrophes naturelles,
- promotion du tourisme,
- facilitation du commerce,
- intégration des réseaux routiers,
- interconnexion des réseaux électriques,
- intégration des services de télécommunication,
avec l'AMI (Autoroute méso-américain de l'information).
Les quatre dernières composantes, qui représentent l'infrastructure
nécessaire pour encourager les multinationales à investir
dans la zone du Plan Puebla Panama, sont les plus importantes aux yeux
du gouvernement Fox. Les crédits seront destinés essentiellement
à l'amélioration des routes et, en second lieu, à
l'interconnexion des réseaux électriques et à la
facilitation du commerce. Ces huit composantes se traduisent par divers
grands projets, au nombre de 28 au total.
De combien d'argent dispose-t-on pour le Plan Puebla Panama
Il serait question de quelque 10 milliards de dollars, mais certaines
sources parlent de 25 milliards. Les principaux bailleurs de fonds sont
la BID, la Banque mondiale, l'Union européenne, la Société
andine de développement (SAD), la Banque centraméricaine
d'intégration économique (BCIE) et les organismes de développement
des gouvernements des États-Unis, du Japon, de l'Espagne et d'autres
pays.
Certains pays visés par le Plan Puebla Panama se serviront de
l'argent des contribuables pour créer ou améliorer des
infrastructures. Le gouvernement mexicain, par exemple, a inscrit 550
millions de dollars pour le Plan Puebla Panama à son budget 2002.
L'enveloppe initiale, de 742 millions, a dû être réduite.
La plus grande partie de cette somme, environ 84 %, sera consacrée
à la construction de routes. Plusieurs entreprises privées
participeront au financement de certaines dépenses d'infrastructure.
Elles n'ont d'autre but que de prendre le pas sur leurs concurrents
et ainsi contrôler le marché. L'interconnexion des réseaux
électriques offre un bon exemple à cet égard :
le raccordement des lignes du Mexique et de l'Amérique centrale
est un chantier dont le coût s'élèvera à
405 millions de dollars. L'entreprise espagnole ENDESA lui consacrera
45,8 millions et deviendra, par là même, copropriétaire
du réseau.
Quelles seront les incidences du Plan Puebla Panama sur le développement
?
Tout dépend de ce que l'on entend par développement. Le
Plan Puebla Panama est un plan de travaux publics ayant pour objectif
d'attirer des investisseurs étrangers dans la région.
Il est conçu pour satisfaire les intérêts d'entreprises.
Certes, certaines de ces huit composantes sont censées apporter
un remède à la pauvreté de la région, mais
ce sont les composantes qui obtiennent le moins de crédits et
qui sont les moins avancées. Les économistes néolibéraux
prétendent que le Plan Puebla Panama contribuera au "développement
social", mais ils suivent le raisonnement suivant : l'investissement
privé créera des sources d'emplois, et l'emploi éliminera
la pauvreté.
Raisonnement bien simpliste. Car l'investissement, qu'il soit public
ou privé, n'entraîne pas automatiquement une amélioration
du niveau de vie pour la majorité de la population si des mesures
n'ont pas d'abord été prises pour mettre fin aux injustices
structurelles qui existent au plan politique, économique, social
et culturel. En fait, les investissements aggravent fortement la pauvreté,
comme on a pu le voir ces vingt dernières années avec
les investissements engendrés par les politiques néolibérales,
qui n'ont pas mis fin aux injustices ancestrales, ont enrichi les plus
riches et aggravé les inégalités. Dans le Plan
Puebla Panama, rien n'est prévu pour remédier aux racines
de la pauvreté structurelle.
Les mesures et projets inscrits au Plan Puebla Panama sont conçus
en collaboration avec les grandes entreprises et en fonction de leurs
objectifs. Ils ne sont pas pensés dans l'intérêt
des 65 millions de personnes qui vivent dans la zone du Plan Puebla
Panama et qui connaissent pour la plupart un état de pauvreté
extrême, 75 % d'entre elles gagnant moins de deux dollars par
jour. Pour toutes ces raisons, beaucoup d'organismes d'action sociale
s'opposent au Plan Puebla Panama. Un des principaux motifs de cette
opposition s'explique par le fait qu'ils prévoient que les ressources
naturelles seront exploitées pour augmenter les bénéfices
des entreprises, sans aucune préoccupation ou presque pour les
populations qui seront directement touchées. La région
du Plan Puebla Panama abrite une centaine de groupes ethniques, dont
la plupart n'ont jamais entendu parler du Plan. Lorsqu'on les tient
au courant et lorsque les pouvoirs publics ou les banquiers et les entreprises
les consultent en y mettant les formes, c'est souvent pour obtenir leur
caution en leur annonçant de vagues promesses ou en leur faisant
miroiter quelques maigres avantages.
Que contient le Plan Puebla Panama sur l'environnement ?
Nombreuses sont les organisations sociales à s'opposer au Plan
Puebla Panama à cause de ses effets sur l'environnement. Une
de ses principales composantes est le dénommé Corridor
biologique mésoaméricain, un des projets qui reçoit
le plus de soutien de la part de la Banque mondiale depuis quelques
années. Il vise à établir un lien, d'un bout à
l'autre de la région du Plan Puebla Panama, entre diverses portions
de territoire caractérisées par une biodiversité
culturelle et biologique particulièrement riche. Bien qu'il soit
dit que la flore et la faune seront protégées le long
du Corridor, ces territoires seront ouverts aux entreprises pharmaceutiques,
aux fabricants de semences et à d'autres firmes, qui sont tous
désireux d'avoir accès à cette biodiversité
pour breveter de nouveaux produits.
Pulsar, une des plus grandes entreprises mondiales de génie biologique
et de semences, a passé des accords avec Conservación
Internacional pour travailler dans la forêt lacandone du Chiapas.
Conservación Internacional, qui se prétend une ONG écologiste,
compte au sein de son conseil d'administration des cadres de grandes
firmes comme Navigation Technologies Corporation, Eagle River, Inc.,
Hyatt Development Corporation, First Philippine Holding Corporation,
mégaentreprise de gaz et d'électricité, USA Networks,
etc. Quand on connaît les liens qui existent entre ce mégaprojet
et les intérêts des grandes entreprises, il est difficile
de ne pas voir dans le Plan Puebla Panama davantage un plan centré
sur la production d'énergie et l'extraction de richesses naturelles,
plutôt qu'un plan de développement.
Le Plan Puebla Panama n'aura-t-il pas des retombées positives
sur les populations pauvres ?
Il est difficile de lui trouver un côté positif sachant
qu'il s'agit d'un plan conçu dans l'intérêt des
grandes entreprises. Nul doute qu'un plan de 10 milliards de dollars
destiné au plus grand nombre serait très différent
et privilégierait la construction d'écoles, de cliniques
rurales et de pistes pour acheminer les produits agricoles, de préférence
à des autoroutes payantes et à des barrages hydroélectriques.
L'un des avantages les plus rebattus dont le Plan Puebla Panama s'accompagnera
pour les populations pauvres est le nombre d'emplois qui seront créés.
Or ce sont fondamentalement des emplois dans des maquiladoras [entreprises
de sous-traitance, cf. Dial D 2608,
2387, 2386, 2385, 2191, 2163, 2048] comme il en existe depuis 1966 à
la frontière septentrionale du Mexique et comme il en existe
déjà dans toute l'Amérique centrale. La majorité
d'entre elles sont des usines d'assemblage qui importent de la matière
première et des pièces d'autres pays et qui profitent
de notre main-d'uvre bon marché pour fabriquer des produits
finis. Leur production est dissociée des besoins du pays d'accueil,
et elles n'obéissent qu'aux intérêts des entreprises.
Certes, les maquiladoras ont déjà fourni un emploi à
des millions de personnes dans la zone couverte par le Plan Puebla Panama.
Mais elles payent mal leur personnel, et leurs retombées pour
l'économie du pays sont quasiment nulles. Par essence, les maquiladoras
n'ont presque aucun compte à rendre au gouvernement du pays qui
les accueille. Aucune condition ne leur est imposée en matière
d'environnement, de santé, de protection des travailleurs ni
de relations du travail, comme l'exigerait le droit de s'organiser librement
en syndicats. Sont également exclues d'autres règles voulant,
par exemple, que ces entreprises utilisent des biens de production du
pays ou qu'elles y transfèrent leur technologie. Et pourtant,
voilà le modèle que l'on veut promouvoir au Mexique et
en Amérique centrale avec le Plan Puebla Panama : une amélioration
des infrastructures dans le cadre de tels projets et le versement de
bas salaires à notre main-d'uvre encourageraient les entreprises
à créer des maquiladoras, et ces dernières pourraient
employer un grand nombre de paysans expulsés de leurs terres
pour céder la place à la construction de barrages hydroélectriques,
élément essentiel du Plan Puebla Panama.
Y a-t-il d'autres solutions ?
Certes, et des solutions déjà bien avancées. L'Alianza
Social Continental, qui regroupe différents organismes de défense
des droits civils de toutes les Amériques, a élaboré
une proposition différente de la formule du traité de
libre-échange et des règles commerciales que l'on veut
nous imposer dans la ZLÉA. Cette proposition a été
approuvée par des centaines d'organismes d'action sociale et
de défense des droits civils dans toute l'Amérique. Les
documents de l'ASC peuvent être consultés sur sa page web
www.asc-hsa.org ainsi que par l'intermédiaire de la RMALC, à
Mexico, à l'adresse suivante : www.rmalc.org. Oui, d'autres solutions
sont possibles, comme l'affirme Global Exchange : « Les stratèges
et les experts veulent nous faire croire que lintégration
des entreprises au marché mondial est un phénomène
naturel. Mais il n'y a rien de plus faux. Et il en est de même,
du processus économique actuel que l'on appelle "mondialisation".
Simplement, ce dernier a été imaginé et impulsé
par quelques entreprises. Il se trouve dans le monde entier des citoyens
qui sont en train d'ouvrir une nouvelle voie : la mondialisation par
le bas, une mondialisation du peuple qui donne la primauté à
la justice économique, sociale et politique lorsqu'il s'agit
de commerce et d'investissements. Sur le continent américain,
il existe des groupes de citoyens qui ont élaboré un nouvel
accord pour les Amériques, et qui émettent des propositions
pour l'instauration d'échanges commerciaux socialement acceptables
et respectueux de l'environnement.».
(www.globalexchange.org)
¨
Pays d'Amérique centrale concernés
par le Plan-Puebla-Panama
Traduction DIAL.
En cas de reproduction, mentionner la source DIAL.