L'ACTUALITÉ
EN BREF mai 2004 |
Amérique latine - Amérique centrale - Argentine - Bolivie - Chili - Colombie - Cuba - Haïti - Honduras - Venezuela |
AMÉRIQUE LATINE
Le rapport annuel de la Commission économique pour l’Amérique
latine et les Caraïbes (CEPAL) sur l’insertion internationale de
la région fait apparaître une très forte croissance du commerce
avec la Chine durant l’année 2003. L’importance demande des
Etats-Unis, de l’Union européenne et des pays asiatiques en voie
de développement (dont la Chine) a permis une hausse des exportations
de 8,3% pour l’ensemble de la région. Le bloc de pays fait montre
d’un excédent de sa balance commerciale et de sa balance des paiements
sans précédent au cours des 50 dernières années.
A plus long terme, l’effort de diversification productive et commerciale
de la Chine risque cependant de constituer une menace pour les exportations
latino-américaines.
Ce même rapport signale une diminution, pour la 4ème année consécutive, des investissements étrangers dans la région. L’Amérique latine et les Caraïbes sont la seule région au monde à voir les investissements étrangers diminuer en 2003. Le boom de la seconde moitié des années 90 (1995-1999) – qui explique la diminution actuelle – était essentiellement dû aux privatisations qui attirèrent de grandes multinationales, principalement dans le secteur des services et, dans une moindre mesure, dans les secteurs des ressources naturelles et de l’industrie manufacturière.
Le samedi
29 et dimanche 30 mai se réunissaient à Guadalajara (Mexique)
les représentants de 33 pays latino-américains et des Caraïbes,
et de 25 pays de l’Union européenne. C’est la 3ème
réunion de ce type organisée depuis 1999. Les négociations
ont pour but de renforcer l’intégration commerciale des deux régions,
qui, à elles deux, représentent 15% de la population mondiale.
De nombreuses organisations altermondialistes se sont réunies en parallèle
pour discuter d’alternatives possibles au modèle actuel de mondialisation
et exprimer leur rejet – de forme et de fond – des négociations
menées par leurs gouvernements.
AMÉRIQUE CENTRALE
Le gouvernement des Etats-Unis a signé, vendredi 28 mai, l’Accord
de libre-échange avec 5 pays d’Amérique centrale (Costa
Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras et Nicaragua). Les représentants
du Parti démocrate, actuellement dans l’opposition, ont déclaré
que l’accord, qui a été conclu sans consulter le Congrès,
et qui ne promet aucune amélioration des conditions de travail des Américains
et des Centraméricains, était condamné à l’échec.
Certains républicains s’opposeront à l’accord qui
ouvre le marché états-unien aux textiles, au sucre et aux agrumes
centraméricains. Sander M. Levin, le leader des démocrates au
sein de la commission chargée du sujet, ne croit pas que le gouvernement
pourra réunir les 25 à 30 votes démocrates nécessaires
à l’approbation de l’accord.
ARGENTINE
Jeudi 6 mai, la réunion organisée par l’organisme national
régulateur du gaz (Energas) et convoquant fonctionnaires, délégués
des entreprises privées du secteur, législateurs et organisations
de consommateurs pour discuter de l’augmentation des prix du gaz naturel
sur le marché intérieur – dans un premier temps, elle concernerait
seulement les grands consommateurs –, a été suspendue. Les
organisations de consommateurs et les membres du Congrès ont dénoncé
les pressions exercées par les compagnies pétrolières sur
le président et refusé de se prêter au jeu.
Mardi 25
mai, le président Néstor Kirchner célébrait le 1er
anniversaire de son arrivée à la Casa Rosada, le palais présidentiel.
En un an, il a réussi à multiplier par 3 ou 4 sa popularité
– il avait obtenu 22% des suffrages exprimés lors du 1er tour des
élections présidentielles en avril 2003 –, et à restaurer
l’autorité présidentielle et la crédibilité
des institutions politiques. Le Produit intérieur brut a crû de
8,7% en 2003, mais la crise énergétique risque de freiner la croissance
en 2004. Une série de problèmes (révision des tarifs avec
les entreprises privées qui assurent les services publics, renégociation
de la dette privée déclarée en cessation de paiement depuis
décembre 2001…) risque aussi de mettre fin à l’état
de grâce.
BOLIVIE
Jeudi 6 mai, le Tribunal constitutionnel déclarait sans effet le verdict
des tribunaux militaires qui, en octobre 2003, avaient déclaré
innocents 4 officiers accusés de la mort de 2 civils lors des manifestations
de février 2003, et ordonnait leur instruction par la justice pénale
ordinaire. Pour protester contre la décision, les commandants de l’armée
bolivienne ont ordonné le lendemain le casernement et la mise en alerte
des troupes. Après s’être réunis sans succès
avec le ministre de la présidence, José Galindo, ils ont décidé
de maintenir le casernement.
Des Guaranis
– ethnie minoritaire en Bolivie – vivant dans le sud du pays ont
empêché pendant 5 jours le passage de fournitures et de denrées
alimentaires vers les compagnies pétrolières qui exploitent les
gisements gaziers de Campo Margarita, la plus grande réserve bolivienne
de gaz naturel. Les barrages routiers et les manifestations pacifiques s’interrompirent
lorsque le gouvernement s’engagea à assigner 2% des royalties que
reçoit l’Etat au développement communautaire. Les Guaranis
revendiquent aussi la nationalisation des gisements de gaz situés sur
leurs terres et concédés en 1997 à des entreprises étrangères.
Le manifeste de l’Assemblée du peuple guarani, rendu public le
27 avril, précise que d’autres mesures seront prises si leurs revendications
ne sont pas entendues.
CHILI
Les présidents chilien, Ricardo Lagos, et paraguayen, Nicanor Duarte
Frutos, ont signé, vendredi 14 mai, un accord qui prévoit l’octroi
d’une zone franche de 1700 m² dans le port d’Antofagasta, au
nord du Chili, pour le transit des exportations et importations paraguayennes.
Pour la diplomatie chilienne, c’est une manière de répondre
à la revendication bolivienne d’un accès à la mer,
en montrant que des accords sont possibles lorsque les deux parties en ont la
volonté.
Dans son annuel « message à la nation » du 21 mai, le président Ricardo Lagos a fait part de sa volonté de réformer en profondeur le système électoral actuel, mis en place en 1987 par le général Pinochet. Il entend promouvoir l’inscription automatique sur les registres électoraux et l’exercice volontaire du droit de vote, à l’inverse du système actuel, fondé sur l’inscription volontaire et le vote obligatoire. Actuellement, quelque 2 millions de jeunes de plus de 18 ans ne sont pas inscrits sur les registres électoraux (pour une population totale de 16 millions de personnes). Il a aussi appelé de ses vœux la suppression des sénateurs désignés ou nommés à vie, ainsi que du système « binominal » (sont élus deux représentants pour chaque district de députés et circonscription sénatoriale) qui favorise les grandes coalitions aux détriments de forces mineures comme le Parti communiste et les écologistes.
Vendredi
28 mai, la cour d’appel de Santiago a levé l’immunité
d’Augusto Pinochet, aujourd’hui âgé de 88 ans, afin
d’examiner sa responsabilité dans l’opération Cóndor.
Si les avocats de la défense font appel, il reviendra à la Cour
suprême de trancher.
COLOMBIE
Après 18 mois de négociation infructueuse, le plus grand syndicat
colombien, l’Union syndicale ouvrière de l’industrie du pétrole
(USO) a initié une grève au sein de l’entreprise pétrolière
publique Ecopetrol le 22 avril. Le lendemain, le gouvernement déclarait
la grève illégale, arguant du statut de service public de l’entreprise.
Les grévistes reprochent au gouvernement d’attenter contre les
intérêts de la principale entreprise nationale colombienne et donc
du pays. En juin 2003, celui-ci a en effet enlevé à Ecopetrol
le contrôle des hydrocarbures de propriété nationale, ce
qui lui permettait de vérifier les volumes extraits par les compagnies
étrangères. Il a aussi décidé de convertir l’entreprise
nationale en une société par actions.
CUBA
George W. Bush annonçait, jeudi 6 mai, une série de mesures
visant à renforcer le blocus contre Cuba, mis en place il y a 44 ans.
L’intention déclarée des mesures est de favoriser le « changement
démocratique » dans l’île. Mais entrent aussi
en jeu des considérations électorales, à 6 mois d’élections
où l’appui des exilés cubains pourrait s’avérer
décisif. Les mesures cherchent à réduire l’afflux
d’argent et de visiteurs des Etats-Unis vers Cuba. Elles prévoient
aussi la mise à disposition de 59 millions de dollars destinés
à la diplomatie publique (diffusion d’informations à destination
des visiteurs de l’île) et au soutien des activistes cubains et
aux familles des dissidents prisonniers.
Le plan de Washington a été rejeté par la population cubaine, y compris par les membres de l’opposition démocratique qui y voient une grave manifestation d’ingérence. Vendredi 14 mai, le gouvernement cubain organisait une grande manifestation de protestation face au Bureau des intérêts des Etats-Unis à la Havane. Selon des estimations officielles, environ 1 million de personnes aurait participé à la mobilisation.
Mardi 11 mai, le gouvernement de Fidel Castro annonçait une série de mesures pour réagir au « plan de transition à la démocratie à Cuba » annoncé par Washington. Les mesures comprennent notamment la restriction à la vente, dans les magasins du réseau de vente en dollars, des produits qui ne sont pas de première nécessité et l’augmentation des prix des aliments et des combustibles.
Plus de
500 émigrés cubains se sont rassemblés à la Havane,
du vendredi 21 au dimanche 23 mai, lors de la IIIème Conférence
de la nation et l’émigration, pour discuter avec le gouvernement
de la réponse adoptée par Cuba au plan de Washington, qui doit
entrer en vigueur le 1er juin. Lors de la réunion, le gouvernement cubain
a confirmé la suspension à partir du 1er juin de l’exigence
d’un permis d’entrée dans le pays pour les cubains en provenance
de l’étranger. La flexibilisation coïncidera avec l’application
des restrictions du plan états-unien qui établit que les résidents
cubains aux Etats-Unis seront autorisés à visiter l’île
tous les 3 ans seulement, et à condition d’y avoir de la famille
proche. Les mesures adoptées par le gouvernement cubain face au plan
états-unien ont obtenu le soutien massif des participants.
HAÏTI
Les pluies torrentielles de la dernière semaine de mai ont provoqué
de graves inondations durant lesquelles sont mortes plus de 800 personnes alors
qu’environ 13 000 sont portées disparues. Dans ces circonstances,
l’aide économique promise par l’Union européenne,
en particulier la France, les Etats-Unis, la Banque interaméricaine de
développement (BID) et le Programme mondial d’alimentation de l’ONU
est plus que jamais nécessaire. Mais les fonds arrivent lentement.
HONDURAS
Lundi 17 mai, un incendie dans une prison de San pedro Sula fait 103 morts.
Il s’agit essentiellement de jeunes issus de milieux défavorisés,
membres d’une bande célèbre pour sa violence, la mara Salvatrucha,
emprisonnés dans des conditions déplorables et victimes d’une
politique avant tout répressive.
VENEZUELA
Dimanche 9 mai, les autorités vénézuéliennes arrêtaient
86 paramilitaires colombiens vêtus d’uniformes de l’armée
vénézuelienne dans une propriété d’un membre
de l’opposition, aux alentours de la capitale. Depuis lors, 16 autres
Colombiens ont été arrêtés, plusieurs propriétés
de chefs d’entreprise et de politiques liés à l’opposition
ont été perquisitionnées et une dizaine d’officiers,
dont 4 appartenant à l’armée d’active ont été
arrêtés. Selon le gouvernement, les paramilitaires avaient été
conduits aux environs de Caracas par des opposants extrémistes pour participer
à une opération visant des installations militaires et divers
fonctionnaires et dirigeants politiques. Pour certains dirigeants de l’opposition,
anciens ministres de la défense et conducteurs de programmes télévisés,
il s’agit d’un « show monté par Chávez »
pour détourner l’attention du processus de référendum
révocatoire de son mandat.
Du vendredi
28 au dimanche 30 mai était organisé la procédure de ratification
des 1,2 million de signatures considérées douteuses par le Conseil
national électoral. Quelque 2 600 centres répartis dans tout le
pays étaient mis à la disposition des électeurs désirant
ratifier leur signature s’ils font partie des 1,2 million de personnes
dont la signature a été considérée comme douteuse,
ou bien la retirer s’ils sont parmi les 1,9 million de personnes dont
la signature a été validée. De la procédure, et
du verdict final du Conseil national électoral, dépendra la convocation,
ou non, d’un référendum révocatoire du mandat présidentiel
d’Hugo Chávez en août 2005.
Rédaction : Nicolas Pinet.
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