AMÉRIQUE LATINE
Une réunion ministérielle du Groupe des 20 pays en voie de
développement (G-20) qui s’oppose à la pratique des subventions
agricoles des Etats-Unis, de l’Union européenne et du Japon, était
organisée à São Paulo le 12 juin. Elle a été
l’occasion d’un renforcement de l’unité du groupe et
d’un début de rapprochement avec le Groupe des pays des 90 (G-90),
formé lui aussi à Cancún lors de la dernière conférence
ministérielle de l’OMC et qui réunit les pays qui s’opposent
aux tentatives des Etats-Unis et de l’Union européenne d’inclure
dans les négociations commerciales les « thèmes de
Singapour », c’est-à-dire les services, les investissements,
les achats gouvernementaux et la propriété intellectuelle. Un
représentant du G-90, Clément Rohee, ministre de la coopération
et du commerce de Guyana, était présent lors de la réunion.
De même, le ministre des affaires étrangères brésilien,
Celso Amorim représentait le G-20 lors de la réunion ministérielle
du G-90, le 3 juin en Guyana.
Un rapport publié à la mi-juin par l’Organisation internationale
pour les migrations (OIM), basée à Genève, fait apparaître
une augmentation spectaculaire de l’immigration en provenance de l’Amérique
latine et des Caraïbes et à destination de l’Europe, en particulier
de l’Espagne, de l’Italie, du Portugal et de la Grande-Bretagne.
La majorité des immigrants est arrivée durant ces 3 dernières
années, du fait notamment de la crise économique en Amérique
latine, et du renforcement des contrôles migratoires et du durcissement
du régime des visas vers les Etats-Unis, après les attentats du
11 septembre 2001.
Lors de la IXème Conférence régionale sur la femme en Amérique
latine et aux Caraïbes, qui s’est tenu à la mi-juin à
Mexico, les Etats-Unis et des groupes conservateurs ont fait pression sans succès
sur diverses délégations pour que ne soit pas inclus dans la déclaration
finale les termes « droits sexuels et reproductifs » qu’ils
considèrent incitatifs à l’avortement. Dans la déclaration
nommée « Consensus de Mexico », la région
s’est engagée à « réviser et mettre en
place des lois garantissant l’exercice responsable des droits sexuels
et reproductifs et l’accès sans discrimination aux services de
santé, y compris de santé sexuelle et reproductive ».
ARGENTINE
Un officier de l’armée active, le lieutenant colonel Guillermo
Bruno Laborda, a confessé début juin sa participation, dans la
région de Córdoba, à l’assassinat de détenus
durant la dictature (1976-1983). Il a fourni des détails considérés
fondamentaux par les avocats des victimes qui ne disposaient pas jusque là
de témoignage d’un tel poids sur ces crimes.
Le produit intérieur brut (PIB) argentin chuta de 19,6% de 1999 à
fin 2002, date à laquelle l’activité économique du
pays commença à reprendre de l’ampleur. En 2003, il croissait
de 8,7%. En 2004, les prévisions laissent attendre une croissance du
PIB de 5 à 7%, marquant une stabilisation après une forte reprise
postérieure à la crise.
Un mois après la mise en place du plan officiel destiné à
solutionner la crise énergétique déclenchée par
l’augmentation de la demande due à la reprise et à la faiblesse
de l’offre par manque d’investissements des entreprises privées
productrices de gaz naturel, la situation semble stabilisée. Mais le
système fonctionne à son maximum, et ne permettrait pas de faire
face à un surplus de demande si un imprévu surgissait.
BOLIVIE
Le président bolivien, Carlos Mesa, est décidé à
consulter la population par référendum dimanche 18 juillet au
sujet de la gestion des richesses en hydrocarbures du pays, malgré l’opposition
de la Centrale ouvrière bolivienne (COB) et du Comité civique
pro Santa Cruz, qui défend les intérêts des entreprises
et des régions de l’est du pays. Le ministre des mines et hydrocarbures,
Xavier Nogales a démissionné de ses fonctions fin mai, à
la demande du président, après avoir exprimé son désaccord
sur le contenu des questions du référendum qu’il trouvent
peu claires et ambiguës, incitant à répondre « oui ».
Il a été remplacé par Guillermo Torres.
Le maire du village altiplanique de Ayo Ayo, à 81 km de La Paz a été
retrouvé mort, son corps portant des traces de tortures et de brûlures,
sur la place d’armes de son village, après avoir été
séquestré à La Paz. Benjamin Altamirano avait été
accusé de corruption, mais acquitté par la justice. Le village
compte 7 000 habitants indigènes dispersés en 11 communautés
et estancias. Les communautés aymaras ont pour coutume d’appliquer
des châtiments aux autorités locales considérées
incapables ou vénales (coups de fouet, déambulation à dos
d’âne des autorités fautives…), mais la cruauté
du crime a provoqué la condamnation des autorités centrales et
soulevé quelques doutes sur les auteurs du meurtre. Le malku (chef originaire)
de Ayo Ayo, a déploré la mort d’Altamirano et déclaré
que le meurtre d’une personne n’était pas au nombre des châtiments
prévus par la justice indigène. Pour une chercheuse d’une
ONG travaillant sur le terrain, il s’agirait plutôt d’une
lutte de pouvoir entre partis politiques en vue des élections de gouvernements
locaux en décembre 2004, se servant de la justice communautaire pour
déguiser leurs actes.
BRÉSIL
Le refus du Sénat de fixer le nouveau salaire minimum à 83 dollars,
comme le proposait le gouvernement, constitue la plus grande défaite
politique du président Luiz Inácio Lula da Silva depuis son accession
au pouvoir. La valeur de 88 dollars fixée, vendredi 18 juin, par la Chambre
Haute représente en outre une formidable charge supplémentaire
pour le système de prévision social brésilien, déjà
déficitaire. Le salaire minimum sert en effet de base à tous les
réajustements des prestations de la sécurité sociale.
CHILI
Vendredi 4 et samedi 5 juin se réunissaient à Pucón, au
sud du Chili, les ministres du commerce des pays qui participeront au Forum
de Coopération économique Asie-Pacifique (dit APEC, pour son sigle
anglais) prévu pour novembre 2004, à Santiago. Etaient notamment
présents le directeur général de l’Organisation mondiale
du commerce (OMC) et le responsable du commerce états-unien, Robert Zoellick.
Parallèlement s’est tenue une rencontre intitulée « Le
peuple mapuche et les organisations sociales contre l’APEC ».
Un projet rendant obligatoire la publication des 143 lois secrètes promulguées
pendant la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990) a
été approuvé, mardi 15 juin, par 101 votes en faveur et
une abstention par la chambre des députés. Avant d’être
ratifié par le Sénat, le projet devra cependant repasser par la
commission de défense du Parlement qui avait approuvé le projet
en mai tout en maintenant secrètes 32 lois, considérant que leur
divulgation affecterait la sécurité du pays. Viviana Díaz,
la secrétaire général de l’Association des parents
de détenus-disparus (AFDD pour ses sigles en espagnol), a exprimé
sa satisfaction au sujet du vote et demandé que soient rendues publiques
l’ensemble des lois de la dictature.
COLOMBIE
La presse colombienne commence à évoquer la mise en place d’une
vaste opération militaire, nommée Plan Patriote, destinée
à lutter contre la guérilla des Forces armées révolutionnaires
de Colombie (FARC) dans le sud du pays. Selon les informations diffusées
par la presse, l’opération s’appuierait sur quelque 17 000
soldats colombiens entraînés, conseillés et équipés
par des instructeurs états-uniens. Le Bureau de Washington sur l’Amérique
latine (Washington Office on Latin America – WOLA) a envoyé le
14 mai un mémorandum au Congrès états-unien déclarant
que « le Plan Patriote marque l’entrée des Etats-Unis
dans une nouvelle phase, plus intense, de participation militaire dans le conflit
armé colombien ». L’organisation, qui fait campagne
auprès du Congrès pour qu’il n’autorise pas une augmentation
de la présence militaire états-unienne en Colombie, affirme que,
à la différence du Plan Colombie, le Plan Patriote, exclusivement
militaire, ne prévoit pas d’amplifier la lutte antidrogue qui justifiait
la participation états-unienne.
CUBA
La production de sucre, principale production primaire du pays, est passée
de 2,2 millions de tonnes en 2003 à 2,5 millions de tonnes en 2004, sans
atteindre cependant les chiffres prévus. Si l’on ajoute à
cela le prix élevé du pétrole, la sécheresse persistante
et l’intensification de l’embargo états-unien, les perspectives
de l’économie cubaine sont plutôt sombres. La conjonction
de ces facteurs augmente les problèmes financiers de l’île
et retarde le processus de récupération de la crise des années
1990.
ÉQUATEUR
Début juin, la XXXIVème Assemblée générale
de l’Organisation des Etats américains (OEA) à Quito a été
l’occasion d’importantes manifestations de la part de groupes indigènes
et d’autres organisations sociales et politiques réunies pour exprimer
leur mécontentement face à la politique suivie par Lucio Guttiérrez,
élu avec le soutien de la Confédération des nationalités
indigènes d’Equateur (CONAIE). La CONAIE a aussi organisé
des barrages routiers dans divers endroits du pays.
GUATEMALA
Mardi 8 juin, une centaine d’organisations sociales de paysans, de petits
commerçants et de syndicats réalisaient avec succès une
journée de grève générale qui paralysa une grande
partie du pays. Le président Oscar Berger, au pouvoir depuis 6 mois,
avait menacé d’utiliser la force pour réprimer le mouvement,
mais, face au succès de l’initiative, il acceptait de dialoguer
avec les organisations sociales, mardi soir. Après plusieurs heures de
négociation, un accord était trouvé et la grève
suspendue. Les organisations sociales demandaient de mettre fin aux expulsions
violentes des paysans qui occupent des terres privées, de suspendre les
projets du gouvernement d’une hausse des impôts et de réviser
l’accord de libre-échange signé fin mai avec les Etats-Unis.
HAÏTI
Les 15 petits Etats des Caraïbes, regroupés au sein du CARICOM maintiennent
leur exigence d’une enquête sur les conditions de la chute de l’ancien
président haïtien. Mardi 8 juin, l’assemblée de l’Organisation
des Etats américains (OEA), réunie du 6 au 8 juin à Quito,
adoptait, sur leur proposition, une résolution qui ouvre la possibilité
d’une enquête.
Un Cadre de coopération intérimaire (CCI) a été
élaboré durant 6 semaines par un groupe d’experts dont la
majorité provient d’institutions comme l’Agence pour le développement
international, des Etats-Unis, et la Banque mondiale. Le plan, d’orientation
économique néolibérale, propose des privatisations, l’installation
de nouvelles zones franches, le développement du tourisme et des exportations
agricoles. Ce document publié début juin servira de base aux discussions
lors de la « Conférence d’engagement », qui
se tiendra le 19 et 20 juillet à Washington et réunira des représentants
du gouvernement d’Haïti et de la communauté internationale
des donateurs.
PARAGUAY
L’ancien général Lino César Oviedo, condamné
à 10 ans de prison pour une tentative de coup d’Etat contre l’ancien
président Juan Carlos Wasmosy (1994-1998), accusé d’être
l’auteur intellectuel de l’assassinat de l’ancien président
Luis María Argaña (en mars 1999) et de 8 étudiants tués
lors des manifestations qui avaient suivi l’assassinat – le « mars
paraguayen » – est rentré au Paraguay fin juin pour
que, si on en croit ses dires, la lumière se fasse sur l’assassinat
de Argaña. Il vivait au Brésil depuis 2000. Selon de nouveaux
témoignages, Argaña ne serait pas mort par balle dans sa voiture,
comme l’ont établi l’autopsie et l’enquête officielle,
mais d’un infarctus lors d’une visite chez une amante. La famille
du défunt et la Cour considèrent qu’Oviedo a préparé
l’apparition de ses « révélations ».
EL SALVADOR
Mardi 1er juin, Antonio Elías Saca, de l’Alliance républicaine
nationale (ARENA) prenait ses fonctions à la présidence (pour
5 ans). Il avait été élu en mars, face au candidat du Front
Farabundo Martí pour la libération nationale (FMLN), Schafik Nadal.
L’ARENA, au pouvoir depuis 15 ans, disposera de 27 sièges au Parlement
contre 31 pour le FMLN, sur un total de 84. Le jour de la prise de fonctions,
des milliers de sympathisants du FMLN manifestaient dans les rues de la capitale
accusant le nouveau gouvernement d’être néolibéral
et de suivre les recettes économiques de Washington et des organismes
financiers internationaux.
VENEZUELA
Le Conseil nacional électoral (CNE) a fait savoir, jeudi 3 juin, que
la coalition de l’opposition avait dépassé le quorum minimum
de 2 436 083 signatures et que le référendum aurait donc bien
lieu. La date en a été fixée au 15 août. La demande
qui sera faite aux 12,5 millions d’électeurs sera la suivante :
« êtes-vous d’accord de laisser sans effet le mandat
populaire octroyé par le biais d’élections démocratiques
légitimes au citoyen Hugo Rafael Chávez Frías comme président
de la république bolivarienne du Venezuela pour la période présidentielle
actuelle ? » Si le mandat de Chávez est révoqué,
le vice-président, José Vicente Rangel, assumera le pouvoir et
des élections seront organisées dans les 30 jours suivants.
Rédaction : Nicolas Pinet.
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