AMERIQUE LATINE
La XXXVe Assemblée générale de l’Organisation
des Etats américains (OEA) s’est tenue début juin en Floride.
La proposition états-unienne de créer un mécanisme de supervision
de la qualité de la démocratie dans les pays du continent n’a
pas été retenue dans la déclaration finale. Le projet,
qui prétendait évaluer la manière de gouverner et non seulement
le fait d’avoir été élu démocratiquement,
visait particulièrement le Venezuela de Chávez.
AMERIQUE
DU SUD
Le XXVIIIe sommet des chefs d’Etat du Marché commun du Sud (Mercosur,
composé du Paraguay, de l’Uruguay, du Brésil et de l’Argentine
en tant que membres de plein droit) s’est tenu lundi 20 juin à
Asunción (Paraguay), en présence des dirigeants des pays membres
associés (Venezuela, Colombie, Chili, Équateur, Bolivie, Pérou).
La présidence semestrielle a été transférée
du Paraguay à l’Uruguay. La réunion a vu la création
du Fonds de convergence structurelle (FCE pour son sigle en espagnol) qui viendra
en aide aux régions les plus pauvres. Les différentes contributions
au fonds sont fixées à 70% pour le Brésil, 27% pour l’Argentine,
2% pour l’Uruguay et 1% pour le Paraguay. Ce dernier pays devrait recevoir
48% des fonds, l’Uruguay 32%, et l’Argentine et le Brésil,
10% chacun. En 2006, le FCE s’élèvera à 50 millions
de dollars, augmentant à 75 millions en 2007 et atteignant 100 millions
en 2008. Les procédures de fonctionnement doivent être définies
d’ici à la fin de l’année et le Fonds devrait commencer
à opérer en 2006 à moins que les ratifications nationales
et les aménagements budgétaires ne demandent plus de temps.
ARGENTINE
Mardi 14 juin, la Cour suprême de Justice a déclaré inconstitutionnelles
les lois du Point final – qui avait limité à 30 jours l’intervalle
pendant lequel des plaintes concernant la répression de la dictature
pouvaient être déposées – et de l’Obéissance
due – qui relevait les militaires subalternes de leur responsabilité
pénale du fait de leur situation de subordination hiérarchique
– promulguées respectivement en décembre 1986 et juin 1987,
peu après le procès (1985) des généraux au pouvoir
pendant la dictature (1976-1983). L’argumentation s’appuie sur le
fait que, depuis la réforme de la Constitution en 1994, ces lois sont
en contradiction avec les normes de droit international et interaméricain
que la Constitution inclut. Le Congrès législatif avait déjà
voté la dérogation (1998) puis l’annulation (2003) des lois.
L’état major de l’armée argentine a demandé mercredi 15 juin, le lendemain de la décision de la Cour suprême, la dérogation de la grâce octroyée en 1990 aux chefs de la dictature militaire. Le lieutenant général Roberto Bendini, chef de l’état-major de l’armée a déclaré ainsi que « cela n’était pas possible que les sous-lieutenants d’alors soient en prison et que les responsables principaux et supérieurs hiérarchiques soient libres ». Mardi 21 juin, l’ancien général Carlos Suárez Mason, un des principaux responsables de la répression durant la dictature est mort à l’âge de 81 ans, alors qu’il allait être jugé pour crimes contre l’humanité.
BOLIVIE
Mercredi 1er juin, après dix jours de mobilisations dans la ville de
La Paz et El Alto, les quelque 20 000 paysans, professeurs, commerçants
et universitaires, regroupés en un Pacte antioligarchique et réclamant
la convocation d’une assemblée constituante, décidaient
de mettre à nouveau en avant la revendication d’une nationalisation
des champs d’hydrocrabures, après que le Congrès législatif
n’avait pas siégé pendant 2 jours, alléguant l’insécurité
ambiante. Le 3 juin, le président Mesa décidait de fixer par décret
au 16 octobre un référendum sur l’autonomie régionale
et l’élection de délégués à l’assemblée
constituante, revendications que le Congrès qui continuait à ne
pas siéger laissait sans réponse. Lundi 6, après une tentative
de médiation de la Conférence épiscopale de Bolivie, le
président Carlos Mesa présentait sa démission pour tenter
de trouver une solution à la crise par le biais de l’organisation
à terme d’élections anticipées. Face à la
recrudescence des mobilisations à La Paz, le Congrès décidait
de se réunir jeudi 9 à Sucre, la capitale, alors que se multipliaient
les négociations sur la succession de Mesa. Les manifestants décidaient
alors de se rendre à Sucre pour faire pression sur le Congrès.
Constitutionnellement, les successeurs possibles étaient, par ordre de
priorité, le président du sénat, Hormando Vaca Díez,
le président de la chambre des députés, Mario Cossío,
et celui de la Cour Suprême de justice, Eduardo Rodríguez, les
deux premiers n’ayant pas le soutien de la population. Le désistement
de ceux-ci dans la nuit du 9 permettait la désignation d’Eduardo
Rodríguez, alors que des affrontements entre la police et des mineurs
à la périphérie de Sucre provoquaient un mort et 3 blessés.
Le nouveau président est confronté au refus de démissionner
des parlementaires – qui est l’unique chemin constitutionnel pour
pouvoir convoquer des élections générales anticipées
– et à la menace d’une reprise des mobilisations populaires.
BRESIL
Le 5 juin, le président du Parti travailliste brésilien (PTB),
Roberto Jefferson, accusait le Parti des travailleurs (PT) actuellement au pouvoir
de payer des dessous-de-table de 12 000 dollars mensuels aux députés
de deux partis conservateurs, alliés du PT, le Parti libéral (PL)
et le Parti progressiste (PP), pour s’assurer de leur soutien lors du
vote des projets du gouvernement. Un des premiers affectés par le scandale
est le ministre de la Présidence, José Dirceu de Oliveira e Silva,
un proche du président Lula. Ce dernier a présenté jeudi
16 sa démission, après le témoignage (sans preuves) de
Jefferson présenté mardi 14 devant le Conseil d’éthique
de la chambre des députés. Il a déclaré qu’il
reprendrait ses fonctions de député pour « éclaircir
les accusations infondées » contre sa personne, le PT et le
gouvernement.
CHILI
Le 18 mai, la chambre des députés chilienne a de nouveau rejeté
la réforme présentée pour la première fois il y
a 15 ans et prévoyant de conférer aux ethnies indigènes
une reconnaissance constitutionnelle. La réforme dont l’approbation
requérait 76 voix, n’en a obtenu que 53, avec 26 votes d’opposition
et 24 abstentions. Le président Ricardo Lagos, qui a relancé le
projet, n’a pas réussi non plus à obtenir la ratification
de l’Accord 169 de l’Organisation internationale du travail (OIT)
qui protège les droits économiques et sociaux des peuples indigènes.
Mardi 7 juin, la Cour d’appel de Santiago a dicté deux sentences opposées concernant l’ancien dictateur Augusto Pinochet (1973-1990). La première, résultat du vote des 25 magistrats de la Cour réunis en session plénière, relève le général à la retraite de son immunité judiciaire d’ancien président dans l’affaire de la banque Riggs – du nom de la banque états-unienne où ont été découverts des comptes à son nom pour un total de 17 millions de dollars. Accusé d’enrichissement illicite, il devrait donc être arrêté et jugé. La quatrième salle de la même cour a statué ce même jour que le dictateur ne pouvait être jugé dans le cadre des opérations de répression du Plan Condor, pour cause de démence sénile.
COLOMBIE
Mardi 21 juin, la chambre des députés a finalement approuvé,
après un an de discussion, la très controversée Loi de
justice et paix. Au moment de la votation les députés de tous
les partis de l’opposition quittèrent la salle pour manifester
leur mécontentement, la loi étant cependant approuvée,
à l’unanimité, par les partis qui soutiennent le président
Uribe et qui détiennent la majorité. La loi, qui doit fournir
un cadre légal à la démobilisation des paramilitaires,
et d’abord ceux des Autodéfenses unies de Colombie (AUC), est considérée
par ses détracteurs, dont la Commission colombienne de juristes, qui
dispose d’un statut consultatif à l’ONU, comme une « loi
d’impunité ». Une fois la loi entrée en vigueur,
20 juges seront chargés d’enquêter, dans un délai
limité à 60 jours, sur les crimes des 10 000 paramilitaires qui
devraient être démobilisés d’ici à décembre.
Samedi 25 été créé à Bogotá le Mouvement
des victimes de crimes d’Etat (MVCE). L’organisme, qui bénéficie
du soutien du bureau colombien du Haut commissariat des Nations unies aux droits
de l’homme, se chargera de porter plainte auprès des institutions
de justice internationale (Commission interaméricaine des droits de l’homme,
Comité du pacte international des droits civils et politiques de l’ONU
et Tribunal pénal international) dans tous les cas laissés impunis
par la loi colombienne.
MEXIQUE
Raúl Salinas, le frère de l’ancien président mexicain
Carlos Salinas, emprisonné depuis 10 ans après avoir été
condamné comme auteur intellectuel de l’assassinat, en 1994, de
son beau-frère, Ruiz Massieu, alors secrétaire général
du Parti révolutionnaire institutionnalisé (PRI), a été
libéré de ses charges, jeudi 9 juin. Les juges ont considéré
que sa responsabilité n’était pas entièrement prouvée
et décidé de révoquer la peine de prison de 27 ans qu’il
était en train de purger. Raúl Salinas, qui est aussi accusé
de blanchiment d’argent, d’enrichissement illicite et de trafic
d’influence, est considéré comme un symbole de la corruption
des gouvernements du PRI, au pouvoir entre 1929 et 2000.
Le 19 juin, l’Armée zapatiste de libération nationale (EZLN en espagnol) publiait un communiqué décrétant l’alerte rouge générale au Chiapas, la fermeture des caracoles et des locaux des juntas de buen gobierno (comités de bon gouvernement) municipales. Le communiqué invitait aussi les volontaires nationaux ou internationaux à quitter le territoire contrôlé par l’EZLN, ou à rester à leurs risques et périls. Dans des communiqués du lendemain, l’EZLN expliquait que l’alerte rouge et le regroupement des troupes étaient des précautions défensives. Selon le Centre des droits humains Fray Bartolomé de las Casas, situé sur place, l’alerte rouge répondrait aux mouvements de troupes de l’armée mexicaine observés ces 2 derniers mois et à la réactivation de groupes paramilitaires. Dans un communiqué postérieur, l’EZLN a précisé qu’il ne comptait pas réaliser d’actions militaires, mais « autre chose », destinée à faire avancer ses revendications et obliger les politiciens « sans vergogne » à rendre des comptes. Si la stratégie qui sera suivie reste un mystère, il semble que l’EZLN se prépare à occuper de nouveau le devant de la scène. Les 4 années qui ont suivi la marche sur Mexico et le vote d’une loi indigène rejetée par les zapatistes (2001) ont marqué un certain retrait médiatique de l’EZLN.
VENEZUELA
Le gouvernement de George W. Bush a fait savoir fin mai son refus d’arrêter
le terroriste Luis Posada Carriles (voir brèves de mai 2005 sur le Venezuela)
en vue de procéder à son extradition, réclamée par
la justice vénézuélienne. Selon Washington, des informations
basiques manquaient au dossier.
Le président
Hugo Chávez a décidé de suspendre le traditionnel défilé
militaire du 24 juin pour ne pas s’exposer à un attentat potentiel.
Dans son programme hebdomadaire, « Aló presidente »,
il a appelé ses partisans à approfondir la révolution s’il
était assassiné et affirmé que les responsables du gouvernement
et de l’armée étaient prêts à faire face à
cette éventualité.
Rédaction : Nicolas Pinet.
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